Je vis sur une falaise / I live on a cliff

Publié le par Laura Gara

Je vis sur une falaise / I live on a cliff

Avez-vous déjà pris une décision en sachant qu'elle n'était pas idéale ? Vous-êtes vous déjà volontairement mis dans une situation hors de votre zone de confort juste pour vous provoquer un petit peu ? J'ai joué avec moi-même et poussé mes limites un peu plus loin et maintenant, je vis sur une falaise.

Remettons l'histoire dans son contexte. Il y a presque deux mois, j'ai décidé de quitter Torquay pour m'installer à Weymouth. Les deux villes sont plutôt similaires, le sud de l'Angleterre, les mouettes partout, le vent permanent, les glaces le matin et surtout, la nourriture frite, qu'on le veuille ou non. Pourtant, j'avais ma vie, à Torquay. J'avais finalement atteint le stade de la normalité, vous savez, la normalité qui fait qu'on ne se rend même plus compte qu'on est loin de chez nous. J'avais mes habitudes, mes amis, mes rituels quotidiens, mon endroit préféré pour les milk-shakes. J'avais travaillé dur pour y parvenir et pourtant, j'ai décidé de déménager sur une falaise. J'ai sans doute pensé que j'étais forte et que je pouvais endurer n'importe quoi, spécialement un petit bousculement d'habitudes. Puis, j'allais voir de nouveaux paysages, et rencontrer de nouvelles personnes. J'allais quitter ma terre pour un monde meilleur.

Mais le vendredi 21 juillet au soir, je n'ai pas dormi. J'ai essayé de toutes mes forces et sans succès. J'avais une boule au ventre que je n'avais pas ressenti depuis que j'étais partie de Perpignan pour l'Irlande la première fois, en 2015. Un mélange de mal du pays et de peur. Un peu de regret aussi. Qu'avais-je donc fait ? Pourquoi avais-je fait cela à moi-même ? Quelle idée j'avais eu de marcher dans ce bureau un beau jour et de dire : « Transférez-moi » ? J'avais décidé de briser ce lien, cette vie, en pensant trouver mieux, quand c'était déjà très bien.

En une fraction de seconde, je me retrouvais dans une voiture, à regarder mes amis venus dire aurevoir à travers le rétroviseur. Je ne me retournais même pas. Je méritais cette peine, je l'avais infligée à moi-même. Et les larmes sur mes joues se mêlaient à la pluie sur le pare-brise. Puis, on était déjà sur la route. Mon cerveau était plein de pensées qui s'entremêlaient et, à la fois, je ne pensais à rien. Les paysages étaient similaires mais je me sentais étrangère à ce nouveau monde. Un nouveau monde que j'allais devoir concquérir une fois de plus. Nous arrivâmes à la porte d'entrée. La vue était magnifique. Je pouvais voir une ville au loin, et même une île. Mais je trouvais quand même le moyen de trouver que c'était moche. Je n'avais qu'une envie, c'était de rester dans la voiture et retourner d'où je venais. Katie, notre manager, arrêta la voiture, et quelques minutes plus tard, elle allait repartir. « Non » je lui dit. « J'ai l'impression que t'es notre Maman et que tu nous déposes à la crèche. Tu sais, cette sensation que t'as quand t'es petit et que tu vois ta mère partir au loin ». C'était presque un abandon. Je l'avais bien cherché.

Et voilà que je voyais des personnes habillées en bleu partout. Même uniforme et même attitude que nous. Ces gens là allaient devenir mes collègues de travail. Et pourtant je ne daignais même pas les regarder. Tout ce qui comptait à ce moment là, c'était la laideur de l'endroit, et le vide permanent que je ressentais dans mon ventre. Et voici que je commençais à voir mes anciens collègues partout. Chaque personne avait un équivalent ici et c'était la chose la plus rassurante que j'avais eue de la journée. Carmen, Garry, Zoë, Finley, Calin et Christina étaient dans la même situation que moi et fort heureusement, ils étaient là. Ils étaient mon seul repère ici. Ma seule famille.

Puis, après quelques temps, j'ai décidé d'être heureuse ici. De voir plus de couleurs. D'accepter ma nouvelle maison et d'y rester fidèle. « Cet endroit n'a pas d'âme », c'est ce que je disais souvent à Carmen. Eh bien, dans ce cas, j'allais y remédier et intégrer la mienne. M'ouvrir aux gens un peu plus et aimer chaque seconde ici. Commencer à sourire aux inconnus et les faire danser. Et cela marche ! J'ai le meilleur club de danse ici que partout ailleurs où j'ai travaillé. La vue sur la mer est la plus belle que la vue de tous mes prédécents jobs. Quand il fait soleil, il y a tellement d'étoiles dans la mer qu'on ne peut même plus la regarder sans se faire mal aux yeux. La morale de mon histoire, j'ose penser qu'on la connait tous. Si tu mets un peu de ton âme où tu que tu ailles, alors ta maison sera partout. Et après tout, ce n'est pas tous les jours que l'on peut vivre sur une falaise.

Je vis sur une falaise / I live on a cliff Je vis sur une falaise / I live on a cliff

Have you ever made a decision knowing that it would not be the ideal one? Have you ever put yourself in a situation out of your comfort zone on purpose just to provoke yourself a little bit? I played with myself and pushed my limits a bit further, and now, I live on a cliff.

Let's put the story in context shall we? Almost two months ago, I decided to leave Torquay for Weymouth. The two towns are pretty similar: South of England, seagulls everywhere, perpetual wind, ice creams in the morning and, mainly, fried food whether you want it or not. But I had my life in Torquay, I finally reached the “normal” step, you know, the step when it feels normal to be here and eventually, you don't even realise that you are far from home anymore. I had my habits, my friends, my daily rituals, my favourite milk shake place and everything. I worked so hard to get this and yet, I chose to move on a cliff. I probably thought I was strong enough, that I could handle anything, specially a little change of habits. Plus, I was about to see new landscapes and meet new people. I was just leaving my land for a better World.

But on Friday 21st July evening, I did not sleep. I tried with all my strengths, but still. I was upset and I had not felt this thing in my belly since the first time I left Perpignan for Ireland in 2015. A mix of home-sickness and fear. A bit of regret as well. What have I done? Why did I do this to myself? Where did this idea of walking in an office and say “Transfer me” come from? I had decided to break up with myself, with this link, this life, thinking I would find better somewhere else, when it was already really good where I was before.

One second later, I was in a car, watching my friends who came over to say goodbye through the rear-view mirror. I did not even turn around. I deserved this pain, I did it to myself. And the tears running on my cheeks were matching with the drops of rain on the windscreen. Then, we were already on the road. My brain was full of thoughts and at the same time, I was not thinking about anything. The landscapes were similar but I felt like a stranger to this new World, a new Word that I would have to conquer one more time. We arrived at the gate. The view was wonderful. I could see a cute little town a few miles away, and even an island a bit further. But I still found a way to find it ugly. I had one wish at that time: staying in the car and going back to where I was coming from. Our manager Katie stopped the car, and a few minutes later, she was ready to go again and leave us. “No” I said “I feel like you are our Mum and you are dropping us off at the nursery. You know this feeling when you're a child and you see your Mum going away more and more...” It felt almost like she was abandoning us. But I was responsible for it.

And here were all the people wearing blue again. Same uniform, same attitude as us. Those people were about to become my coworkers. I did not even look at them. All I could think about at this moment was the ugliness of this place and the emptiness I felt in my chest. I was starting to see my former coworkers everywhere. They all had a twin here and it was the most reassuring thing I had in days. Carmen, Garry, Zoë, Finley, Calin and Christina were in the same situation and thank God, they were here. They were my only landmark, my only family, everything I had left.

Then after a while, I decided to be happy here. To see more colours. To accept my new home and be faithful to it. “This place has no soul”, is what I used to say to Carmen. Well, in that case, I had to change it, and start by putting a bit of my soul in here. To open myself to people a bit more and love every second spent in this new centre. To start smiling to strangers and make them dance. And it worked! I have the best dance club here than anywhere else I have worked at. The view of the sea is the most gorgeous view I have ever had among all my former jobs. When it's sunny, there are so many stars sparkling in the sea that I can't even watch it without hurting my eyes. I assume everybody gets the moral of my story. If you put a bit of your soul everywhere you go, then your home could be anywhere. And after all, it's not every day that you get to live on a cliff.

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